Le réseau juridique du Québec : Les mesures disciplinaires

LES MESURES DISCIPLINAIRES


Me Patricia Claude, cabinet Patricia Claude Avocate, Québec


Pour alléger le texte le genre masculin est employé mais comprend le genre féminin.


Contenu


Distinction

Il est important de faire la distinction entre

    « mesure non disciplinaire » (administrative)
    « mesure disciplinaire »

Selon que la mesure est « disciplinaire » ou « non-disciplinaire », l’employeur doit procéder de façon différente.

Mesure non disciplinaire

Une « mesure non disciplinaire » est prise lorsque le  manquement du travailleur est involontaire, comme par exemple l’incapacité ou l’incompétence. Il est donc impossible de corriger le comportement.

Si la mesure est « non-disciplinaire » l’employeur doit respecter une gradation des mesures correctives.  Il doit :

    • signaler au travailleur ses lacunes ;
    • l’informer des attentes de l’entreprise ;
    • donner au travailleur la formation nécessaire afin qu’il puisse se corriger et atteindre les attentes ;
    • lui donner une période de temps convenable pour ce faire 
    • aviser le travailleur du risque de congédiement s’il ne s’améliore pas.

Mesure disciplinaire

Une « mesure disciplinaire »  est prise lorsque le travailleur a un comportement fautif qui entraîne le manquement.  Elle vise à corriger le comportement fautif.

Il n’est pas toujours facile de déterminer si on est en présence d’un manquement  « disciplinaire » ou « non disciplinaire ». C’est ainsi qu’à l’occasion les tribunaux ont déterminé qu’il pouvait y avoir une situation mixte.  Effectivement, comment qualifier des problèmes d’absentéisme lorsqu’il n’est pas clair si les absences sont ou non liées à la faute du travailleur.

Avant d’imposer une mesure disciplinaire l’employeur se doit de respecter une gradation des sanctions :

    • avis verbal
    • avis écrit
    • courte suspension
    • longue suspension
    • congédiement
Attention : en présence d’une politique de tolérance zéro, dont le travailleur a été informé, l’employeur n’a pas à respecter le principe de la progression des sanctions.

L’employeur doit, lorsqu’il est rendu à la dernière sanction,  aviser le travailleur qu’au prochain manquement il peut y avoir congédiement.

Avis

Les documents suivants ont été considérés comme des avis disciplinaires.

  1. rapports d’évaluations très critiques et sévères,
  2. mises à jour de directives que le salarié aurait dû respecter,
  3. demandes de prolongation de la période d’actualisation des connaissances de l’employé,
  4. lettre soulignant que les nombreuses absences au travail coïncident avec celles de son épouse qui travaille pour la même entreprise  (sauf s’il s’agit d’absences résultant d’une lésion professionnelle puisqu’il s’agit d’une mesure contraire à l’article 32 de la Loi sur les accidents du travail).

L’avis peut également être verbal.

Suspensions

La durée d’une suspension disciplinaire (donc sans rémunération) est en corrélation avec la gravité de la faute.  Dans les cas les plus graves il peut y avoir une suspension jusqu’à 12 mois.  Au delà de cette durée, les tribunaux peuvent considérer qu’il s’agit d’un congédiement.

Congédiement

Le congédiement est la peine capitale.  Elle ne peut être imposée qu’après avoir épuisé toutes les autres mesures.  Il est contraire au principe de la progression des sanctions qu’un employeur ne sanctionne pas  immédiatement les manquements et qu’il choisisse d’attendre que ceux-ci s’accumulent avant de sévir.

Interdiction à la double sanction

Selon le principe d’équité et de la bonne foi en matière civile, l’employeur ne peut pas, pour un même manquement, punir le travailleur, par deux mesures disciplinaires.

Le principe de la proportionnalité de la faute

L’employeur doit tenir compte de plusieurs facteurs avant d’imposer une mesure disciplinaire, notamment ;

  1. motifs personnels du travailleur ;
  2. son ancienneté ;
  3. son dossier disciplinaire ;
  4. la gravité du manquement ;
  5. la persistance du travailleur à ne pas reconnaître son manquement.

Mais ces facteurs doivent aussi être considérés en tenant compte de la vocation de l’entreprise et des responsabilités confiées au travailleur dans l’accomplissement de sa tâche.

Vocation de l'entreprise

Par exemple, si la vocation de l’entreprise est la réhabilitation de toxicomanes et que le travailleur est sanctionné pour utilisation de drogues illicites sur les lieux du travail, une telle situation peut engendrer une sanction beaucoup plus importante.

Niveau de responsabilités du travailleur

Un travailleur cadre dont la faute est le manque de loyauté peut être congédié sans avertissement, car celui-ci jouit, dans l’accomplissement de ses tâches, d’un niveau d’autonomie élevé.  Par ailleurs, la faute commise remet directement en question le haut niveau de confiance qui doit exister entre un employeur et un cadre.

En somme, avant d’imposer une mesure l’employeur doit faire son enquête afin de recueillir tous les faits pertinents tant pour déterminer la nature du manquement que pour choisir la mesure corrective ou disciplinaire appropriée.


À jour au 11 février 2022


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